par Guillaume Guidoni
Corse-Economie
Inscription à la newsletter

Taux de chômage par territoire en Corse


Toutes les micro-régions de Corse sont touchées par la hausse du chômage. La Balagne et la région de Porto-Vecchio souffrent le plus.



Taux de chômage par territoire en Corse
Le taux de chômage au niveau des micro-régions de Corse a progressé partout au 4e trimestre 2009. En complément avec l’article sur le taux de chômage fin 2009 en Corse il est intéressant de se pencher sur les zones d’emplois de l’île. En effet, les 7 zones d’emploi en Corse sont assez cloisonnées. Ceci se traduit par des évolutions très différentes des principales variables sur le marché du travail.

Ainsi, fin 2009, le taux de chômage varie en Corse de 6,7 % de la population active dans la zone de Corte à 11,8 % sur celle da Calvi/Île-Rousse. Les deux gros pôles de l’île sont toutefois assez proches, avec respectivement 8,9 % et 9,3 % pour les zones d’Ajaccio et de Bastia.

Taux de chômage par territoire en Corse
Sur la période récente, la remontée du chômage a frappé de façon variable les différents territoires de Corse. Ainsi, par rapport au point bas du chômage atteint mi-2008, le taux de chômage est remonté de 1,2 points de % sur Corte contre +2,5 points de % sur la Balagne et la région de Porto-Vecchio. Pour les deux grands pôles d’Ajaccio et Bastia (70 % de l’emploi salarié) la situation n’a pas été très réjouissante, avec une hausse très forte et concentrée du taux de chômage sur la fin 2009.

La très mauvaise performance des régions de Balagne et d’extrême-sud vient selon nous principalement d’un impact beaucoup plus prononcé dans ces zones de la baisse d’activité dans la construction. L’importance de la construction de résidence secondaire dans les zones les plus touristiques de Corse a joué. On notera que la bonne saison touristique n’a pas participé à inverser la tendance.

Conformément à noter scénario, le taux de chômage devrait désormais se stabiliser dans toutes les micro-régions de Corse. Les écarts ne vont donc pas se combler. Toutefois, un rebond de l’activité plus fort que celui auquel nous nous attendons dans la construction pourrait vite avoir un impact en Balagne et dans l’Extrême-sud. Mais, ceci nous semble peu probable.


Jeudi 8 Avril 2010
Guillaume Guidoni


1.Posté par Fabien le 08/04/2010 15:38
Concernant Porto-Vecchio et la Balagne, ce que vous dites ne serait valable que si le taux de chômage était monté récemment. Or, on constate sur votre graphique que ces deux régions sont quand même mal placées sur toutes la période.
Il semble même que l'écart s'accentue les années de forte progression touristique.

Autrement dit, les deux régions les plus touristiques de Corse sont aussi les plus touchées par le chômage, et particulièrement les années où le tourisme est en forme. Coïncidence ?
De quoi s'interroger encore un peu plus sur la pertinence du modèle tout-touristique...

En tout cas, encore merci pour ces précieuses informations.

2.Posté par simoni le 08/04/2010 16:02
Twitter
Autre hypothèse sur les zones Porto-Vecchio et Balagne.
Comme l'activité touristique est saisonnière, cela doit fixer une population active précaire qui expliquerai que le taux de chômage est plus élevé que dans le reste de la Corse.

Maintenant je ne trouve pas logique de mettre en cause le modèle touristique, avec des expression "Tout-tourisme". C'est une des rares activités qui ce situe en haut de la chaine des valeurs en Corse.

Je serai très heureux que la Corse soit un champion en Robotique, qui sera probablement pour le 21 Siècle, ce qu'a été l'Automobile au 20 eme Siècle. Un marché qui va exploser probablement à horizon de 20 ans.

Je ne vois pas en quoi le "Tout-Tourisme" nous empêcherai d'avoir un pôle Universitaire en Robotique comme une petite ville de 5000 hab. à côté de Pise (le plus réputé en europe).
Et d'initié des entreprise dans ce domaine en sourçant les meilleurs start up en Europe.

En tout cas à mon avis ça beaucoup plus d'effet de levier sur le PIB de la Corse que les discours fumeux sur le Développement Durable.

3.Posté par Filippi le 08/04/2010 17:44
Il y aurait des maçons, des électriciens, des plombiers... au chômage à Porto-Vecchio ? Je suis sur place et ce que je vois et entends régulièrement c' est qu' il n' y a eu aucune baisse d' activité pour les entreprises de bâtiment. Dommage que votre article précédent sur la diminution des mises en chantier ne puisse pas être détaillé en micro-régions.
Par ailleurs je suis d' accord avec le commentaire de Simoni lorsqu' il dit que "l' activité saisonnière fixe une population précaire". A Porto Vecchio, depuis quelques temps, on assiste à l' installation de personnes avec peu de qualification professionnelle. Ces gens modestes arrivent à trouver un petit boulot l' été mais, la saison finie, vont pointer à l' ANPE. Mais comme dit la chanson d' Aznavour "la misère est moins pénible au soleil".

4.Posté par Guillaume Guidoni le 08/04/2010 18:15
Pour la seule ville de Porto-Vecchio mises en chantier de 2008 : 373 ; 2009 : 269 (soit -28%). Avec l'effet retard lié à la durée du chantier, on a donc bien une nette diminution de l'activité sur la deuxième partie de 2009. Après je partage aussi le point de vue sur l'emploi précaire lié à l'activité saisonnière. Mais au vue de l'évolution des emplois dans le secteur touristique (cf. sur le site les articles sur l'emploi salarié par secteur) je persiste à penser que l'impact du recul de la construction est prédominant. Mais j'affinerais prochainement les données relatives aux mises en chantier.

5.Posté par Fabien le 08/04/2010 18:59
Je ne mets pas en cause le tourisme. J'emploie l'expression tout-tourisme en connaissance de cause. C'est bien cette version et cette vision du tourisme qui pose problème.

"Tout-tourisme", ça veut dire qu'on se fixe le tourisme quasiment comme seul horizon. Cela implique qu'on ne donne pas ou très peu de moyens à d'autres secteurs d'activité (c'est ce qu'il se passe actuellement en Balagne). Donc on ne peut pas faire du tout-tourisme ET sérieusement de la robotique (ou d'autres activités) : puisque les ressources sont prises par le tourisme, les autres secteurs d'activité sont relégués au second plan.

Dénoncer le tout-tourisme, ce n'est pas refuser le tourisme : c'est souhaiter que le tourisme soit mis à une place qui laisse la possibilité à d'autres secteurs d'activité de se développer. Si possible, d'ailleurs, si nous ne sommes pas mauvais, ces secteurs se développeraient en synergie avec le tourisme (il y a des synergies évidentes tourisme-agriculture, tourisme-environnement, tourisme-artisanat, tourisme-patrimoine, etc).

Oui, bien sûr, c'est bien une population précaire qui se fixe du fait du tourisme, et pointe au chômage le reste de l'année : le tourisme n'est pas à même, dans sa version actuelle, de fournir des emplois à l'année, et c'est un problème de miser aussi exclusivement sur un tel domaine d'activité. Avec des synergies avec d'autres domaines d'activité, ce ne serait pas le cas : on pourrait travailler l'hiver à produire ce qu'on vendra l'été...


>>>> "En tout cas à mon avis ça beaucoup plus d'effet de levier sur le PIB de la Corse que les discours fumeux sur le Développement Durable. "

C'est possible, mais sur quelles bases arrivez-vous à fonder cet avis ? Qu'appelez-vous développement durable ? Quels sont les discours fumeux dont vous parlez ?

Que le tourisme ait un effet positif sur le PIB, c'est indéniable. Mais il a aussi des effets pervers : par exemple, pour des jeunes qui veulent accéder à la propriété pour se loger, le prix du m2 est deux à trois fois supérieur à une région non-touristique de richesse équivalente. Les loyers sont deux fois plus élevés pour les non-propriétaires. Et ça, ça représente des fortunes...

Donc effet positif sur le PIB ne veut pas dire effet positif sur toute la population, et notamment les plus défavorisés. Le tourisme est aussi un important facteur d'inégalités.

---

"Tout-tourisme", c'est bien la situation actuelle : une situation où on ne compte QUE sur le tourisme pour se développer, où il est quasiment interdit de parler des effets pervers du tourisme, où on ne prend en compte que les effets positifs et pas les coûts.

Je n'ai rien contre le tourisme, s'il est pensé objectivement et non pas vu comme le saint-graal du développement économique.

6.Posté par Fabien le 08/04/2010 19:04
Est-ce que la baisse des mises en chantier était déjà enclenchée fin 2007 et en 2008 en Balagne ? Parce que c'est dès la mi-2007 que la Balagne décroche par rapport aux autres régions.
Nul doute que cette baisse des mises en chantiers a accentué le phénomène mais il semble sur vos données qu'il ait débuté plus tôt en Balagne.

7.Posté par Philémon le 13/04/2010 16:18
Difficile d'entendre toujours le même discours sur le toutourisme.
(Sauf s'il s'agit d'une nouvelle race de caniches qu'il conviendrait d'éviter en corse)
Je vous invite à vous reporter au contrat de projet Etat CTC qui fixe les engagements de l'Etat et de la CTC et de l'UE pour la période 2006-2013 et vous verrez que l'agriculture avec 49M€ est loin devant le tourisme avec 17M€.
Difficile donc d'affirmer que les ressources sont prises par le tourisme.
http://www.corse.fr/Le-Contrat-de-projets_a541.html
Philémon

8.Posté par Fabien le 15/04/2010 22:48
Se baser sur le seul contrat de projet Etat-CTC pour évaluer les ressources allouées à un secteur n'a pas de sens. Quand on projette un nouveau port à Bastia pour accueillir quelques bateaux de plus par jour au mois d'août, toute cette dépense (200 ou 300 millions d'euros) n'est suscitée que par les besoins de transporter des touristes. Quand on crée un aéroport à Figari, c'est pour le tourisme. Tous les aéroports et nombre d'autres infrastructures sont surdimensionnés pour répondre au pic de transports et de population estivale. Même chose pour les dépenses de gestion de déchets. Etc. Les dépenses allouées directement au secteur du tourisme ne sont que la partie émergée de l'Iceberg.

Et encore, il ne s'agit que de la dépense publique. Vient ensuite la dépense privée, qui est peut-être encore supérieure. Quand on parle de ressources, il faut prendre celles-ci en compte aussi (c'est comme pour la dette, se focaliser sur la dette publique ne donne qu'une part du problème).

Viennent ensuite des coûts indirects : quand le tourisme fait monter les prix de l'immobilier, c'est un surcoût important pour les jeunes ménages qui cherchent à se loger. Et ce sont des montants très importants. Le prix du m2 en Corse est le double de celui de régions de richesse comparable sur le continent. Pour un foyer moyen, ça fait un surcoût de 100 000 euros pour acquérir son logement. Sachant que les primo-accédants sont ceux qui portent ce surcoût, mais sont aussi les jeunes qui sont censés investir dans la création d'entreprise. Avec la dette qu'ils se mettent aujourd'hui sur le dos, c'est une stérilisation massive de la capacité d'entreprendre à laquelle nous assistons.

Même chose pour les prix du foncier : avec un surcoût d'au moins 10 000 euros l'hectare dû au tourisme en Balagne, je laisse calculer ce que le tourisme non maîtrisé coûte aux jeunes agriculteurs qui cherchent à s'installer... Le tourisme consomme largement de la ressource foncière, et on voit assez peu de surfaces dédiées au tourisme se convertir à l'agriculture.

Viennent ensuite les ressources humaines qui sont largement drainées par le tourisme. Quand on pense création d'entreprise, on pense bien plus facilement tourisme qu'autre chose. Quand on cherche un travail, on trouve plus facilement dans un secteur en lien avec le tourisme qu'ailleurs (hors fonction publique), ou du moins, on pense trouver plus facilement...


C'est dans ce genre de questionnements que Guillaume pourrait sans doute nous éclairer. Savoir quelle est la dépense totale que l'on peut imputer au secteur du tourisme, ses coûts cachés, sans rien oublier, ça, se serait une étude intéressante et difficile. Etude qui dépasserait d'ailleurs le cadre de la stricte économie, si on veut vraiment cerner le problème.

Il faut que nous soyons capables de porter un regard critique sur le tourisme, justement si nous voulons conserver cette ressource. Parce qu'au rythme où nous détruisons nos paysages et quelques autres valeurs, il n'est pas loin, le jour où les touristes se détourneront de la Corse parce qu'elle aura trop perdu de sa beauté.